Loi budgétaire 2019 : MACKY SOLDE SES COMPTES AVEC WADE – «La Lf vise à réparer une économie détériorée de 2000 à 2012»

13 - Octobre - 2018

Se présentant en «réparateur» des maux économiques laissés par Wade, le projet de budget pour 2019 de Macky Sall énumère tout ce qu’il a dû corriger dans la gestion de Wade. Donnant l’occasion à des analystes de faire remarquer au gouvernement que, sur bien des points cités, il n’a non seulement pas fait mieux que Wade, mais qu’en plus, le bilan serait même plus catastrophique après 7 ans de gestion de Macky Sall.
La Loi des finances 2019 est d’une lecture des plus intéressantes. Elle montre à voir que, près de 7 ans après son arrivée au pouvoir, alors qu’il a fixé l’horizon de sa politique à 2035, le Président Macky Sall a toujours le regard dans le rétroviseur de 2012. Il le démontre dès l’entame de la Lf, quand pour expliquer les fondamentaux de sa politique économique à ce jour, son document les «résume en trois concepts simples : réparer, relancer, redistribuer». Et pour ce qui est des réparations à faire, il s’agit bien sûr des politiques qui ont été menées jusqu’en mars 2012 : «En 2012, il fallait commencer par réparer une machine économique détériorée par, entre autres :
i. une politique agricole instable ; ii. Des choix d’investissements inappropriés ; iii. La confiance en baisse des investisseurs et des partenaires techniques et financiers ; iv. Une gabegie budgétaire sans précédent (comme le fait de consacrer plusieurs dizaines de milliards de F Cfa à l’organisation d’un festival au moment où tous les clignotants économiques étaient à l’orange, voire au rouge).»

Et juste après, il y a cette phrase : «Car la bonne santé actuelle de l’économie sénégalaise ne doit pas faire oublier la situation économique et sociale qui était celle du Sénégal à la veille de l’alternance de 2012.»
Le document indique faire ce travail de mémoire «non pas à des fins de stigmatisation, mais parce que si l’on oublie d’où l’on vient, on perd de vue le chemin parcouru, de même que le trajet qu’il reste à accomplir».
Cette vision des choses n’est pourtant pas partagée par les observateurs que Le Quotidien a interrogés. Pour la plupart, ils ont jugé fallacieux les arguments du gouvernement tels que présentés dans la Loi des finances. Et surtout, certains estiment que Wade n’a pas à rougir de la comparaison, quand on compare l’héritage de ses douze ans avec les réalisations de Macky Sall en sept ans.
Ainsi, un fonctionnaire sénégalais, détaché à la Fao au Sénégal, mais qui a invoqué son devoir de réserve pour conserver l’anonymat, a souligné que «depuis l’adoption de la Loi d’orientation agro-sylvo-pastorale en 2004, la politique agricole du Sénégal n’a pas changé. Il y a eu des programmes ponctuels, comme la Goana sous Wade ou le Pnar ou le Pracas sous Macky Sall. Mais dans le fond, c’est la continuité de la même politique qui est mise en œuvre, avec des résultats plus ou moins appréciables». Une manière de dire que dans le domaine agricole, «Macky n’a pas fait mieux ou plus que Wade. D’ailleurs, si l’on a pu obtenir quelques résultats en termes de production rizicole, c’est parce que la Goana avait déjà posé les fondements».
Cela, pour une politique agricole. Mais quid des choix d’investissements ? L’économiste Meïssa Babou, enseignant à l’Ucad, bat en brèche l’argument. Pour lui, le gouvernement actuel devrait se taire sur ce point. «On a critiqué le Monument de la Renaissance en son temps. Mais ce que les gens du pouvoir eux-mêmes reconnaissent actuellement, c’est que c’est devenu l’un des sites de Dakar les plus visités, avec des recettes journalières qui tournent aux environs de 10 millions de Cfa. Et même si le Fesman a connu des dérapages, il a donné une certaine visibilité au Sénégal à cette période. Et si l’on parle des 15 milliards du Fesman, que représentent-ils par rapport aux 80 milliards dépensés pour le machin qui a remplacé le Building administratif, et qui n’est toujours pas inauguré à ce jour ?» Pour en ajouter à la liste de dépenses frisant la gabegie, l’universitaire cite l’autoroute Ila Touba, «dont même les gens de Touba n’étaient pas demandeurs. Sans parler d’un train de 35 km qui n’arrive même pas à l’aéroport, et qui va nous coûter 1 200 milliards de francs Cfa. A ce truc, il faut ajouter les dépenses occasionnées pour les besoins du sommet de la Francophonie, et l’érection d’un bâtiment coûteux et sous-utilisé. Sur ce point, ils ont fait pis que Wade.»
Et quand on lui parle de la perte de confiance des partenaires techniques et financiers, l’enseignant d’économie réplique que depuis le Président Senghor, la signature du Sénégal a toujours été acceptée. Les seuls moments vraiment difficiles ont été les années de Abdou Diouf, quand le pays a connu une dévaluation de sa monnaie, «comme toute la zone Cfa», et qu’il a connu les Programmes d’ajustement structurel (Pas), «à l’instar de la majorité des pays en développement». Ces Pas ont coûté son pouvoir à Abdou Diouf, mais il a laissé une situation de reprise économique. «Et si Wade a laissé un héritage de 36% de taux d’endettement en 12 ans, Macky Sall a fait pire. D’ailleurs, les tensions de trésorerie sont aujourd’hui extrêmes. Au point que l’Etat peine à éponger une dette due depuis 18 mois à des universités privées. Et même les 5 milliards négociés par Mary Teuw Niane ne peuvent toujours pas être payés par Amadou Ba.»
Ces montants s’ajoutent à ceux dus aux enseignants, aux mutuelles dans le cadre de la Cmu, entre autres.
C’est dire donc que si le gouvernement dirigé par Boun Abdallah Dionne veut se comparer aux dernières années de Wade, quand ce dernier semblait à bout de souffle, il devrait présenter des arguments plus solides que ceux qui ont été donnés dans son document de politique budgétaire.

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