Diaspora bonds : patriotisme économique ou illusion comptable ?

22 - Septembre - 2025

Les diaspora bonds apparaissent comme une piste de financement classique, réhabillée dans une rhétorique souverainiste. Ce n’est pas une innovation – le mécanisme avait déjà été expérimenté par le passé par la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS). La véritable question n’est donc pas leur nouveauté, mais leur soutenabilité et leur crédibilité.
L’argument de la solvabilité de l’État du Sénégal mérite d’être nuancé. Dans un pays où le déficit budgétaire et l’endettement public sont déjà sous pression, présenter l’État comme un créancier sûr relève davantage de la promesse politique que de l’analyse économique. La comparaison avec la France est éclairante : des millions d’épargnants y détiennent des obligations publiques qui, en pratique, ne rapportent plus rien, leur rendement réel ayant été rongé par l’inflation. L’épargnant sénégalais de la diaspora doit donc s’interroger : son attachement patriotique suffit-il à justifier un placement qui pourrait perdre sa valeur réelle demain ?
Le taux annoncé de 6 à 7 % paraît attractif comparé à l’épargne classique, mais il doit être mis en regard du risque. Ce risque est double : financier, compte tenu de la fragilité des finances publiques ; et politique, au vu de la gouvernance parfois approximative de la dette. L’élan patriotique peut inciter à souscrire, mais l’histoire économique prouve que la fibre du cœur ne compense jamais la réalité des chiffres.
Le parallèle avec les obligations françaises l’illustre : massivement détenues par les ménages via l’assurance-vie et les fonds de pension, elles ont été vidées de leur substance par des décennies de taux artificiellement bas, transformant une rente promise en illusion comptable. Le danger est que les diaspora bonds sénégalais suivent le même chemin : séduisants au départ, mais décevants sur la durée si la trajectoire macroéconomique n’est pas corrigée. Les managers de ce système n’inspirent pas confiance.
Enfin, l’idée que ces emprunts financeraient directement des infrastructures visibles, comme une autoroute ou un hôpital, est séduisante mais trompeuse. La dette publique ne fonctionne pas comme une caisse affectée : elle se fond dans un budget global, soumis à toutes sortes de contingences. La promesse de « voir » son argent dans un projet précis relève davantage de la communication que de l’économie réelle. Ces gros investissements sont en général soutenus par des financements concessionnels.
En conclusion, les diaspora bonds peuvent diversifier les sources de financement et flatter un sentiment de patriotisme économique. Mais pour ne pas devenir les « obligations sans valeur » de demain, ils doivent être adossés à une gouvernance rigoureuse, à une transparence accrue et à une discipline budgétaire qui, pour l’instant, restent à démontrer.


Ibrahima Thiam, Président du parti ACT

Autres actualités

02 - Décembre - 2025

Sénégal : Ces secteurs qui ont absorbé les principaux investissements en 2025

Pour les neuf premiers mois de l’année 2025, le montant des dépenses d’investissement financées sur ressources extérieures, y compris les...

02 - Décembre - 2025

Yankhoba Diémé annonce l’arrivée de nouveaux taxis et bus au gaz et détaille les réformes en cours

Le ministre des Transports terrestres et aériens, Yankhoba Diémé, a annoncé l’arrivée prochaine de véhicules roulant au gaz destinés au...

02 - Décembre - 2025

IBRAHIMA THIAM : "LE PREMIER MINISTRE EST EN MODE REPLAY"

Ousmane Sonko, fidèle à sa réputation, a une fois de plus déployé sa  méthode habituelle : égrener des rapports, accumuler les...

01 - Décembre - 2025

Ousmane Sonko : ‘’Face aux crises multiformes, la culture est notre plus puissant rempart’’

Le Premier ministre Ousmane Sonko a souligné, dimanche, le rôle ‘’puissant’’ que peut jouer la culture face aux crises multiformes, rappelant qu’aucun...

01 - Décembre - 2025

Thiaroye 1944 : 81 ans après, la vérité se construit entre mémoire et fouilles archéologiques

Le climat frais de ce lundi 1er décembre 2025 semblait porter les murmures des tirailleurs sénégalais tombés à Thiaroye en 1944. Devant le monument...
']); _gaq.push(['_trackPageview']); (function() { var ga = document.createElement('script'); ga.type = 'text/javascript'; ga.async = true; ga.src = ('https:' == document.location.protocol ? 'https://ssl' : 'http://www') + '.google-analytics.com/ga.js'; var s = document.getElementsByTagName('script')[0]; s.parentNode.insertBefore(ga, s); })();