Le varan ou ‘’Bar Mbossé’’, génie protecteur de Kaolack, un patrimoine historique à préserver
Le varan, totem de la ville de Kaolack (centre) incarné par Mbossé Coumba Djiguène, représente un patrimoine historique qui mérite d’être préservé, plaident ses descendants éparpillés un peu partout au Sénégal.
Ces derniers s’attèlent régulièrement à mener des activités pour sa sauvegarde et sa promotion.
Selon la légende, Mbossé Coumba Djiguène vient de la lignée des Ndiégadoum. Son grand-père, un “Lamane”, désignation de l’aristocratie terrienne et titre des anciens rois sérères de la Sénégambie, fut un propriétaire terrien dans l’ancien royaume du Baol, dont les deux filles se déplacèrent vers le Saloum.
La plus âgée, Nioury Badiane, s’arrêta à Guinguinéo, et Ndjira, la mère de Mbossé Coumba Djiguène, qui était encore un bébé, s’installa à Kaolack, au bord du bras de mer du fleuve Saloum.
Membre du Collectif des petits-fils de Mbossé Coumba Djiguène, Farba Loum raconte que l’ancêtre de leur lignée était en bisbilles avec le “Teigne” du Baol, appellation de ce royaume du centre du Sénégal. Il décida alors de de migrer vers le Saloum où il fut reçu par Mbégane Ndour, alors “Buur” (roi) du Saloum.
Mbossé grandit ainsi dans la mer et sa mère fit régulièrement des sacrifices, en y versant du lait caillé et des pâtes à base de riz.
Pour se déplacer, elle se transformait en varan communément appelé Bar Mbossé dans le Saloum. Et lorsqu’elle se rendait au marché, Mbossé Coumba Djiguène se transformait en femme.
Depuis plusieurs années, un rituel est organisé annuellement par ses descendants, à la première semaine du mois d’août. Une cérémonie que d’aucuns assimilent à une pratique animiste, mais qui n’enlève en rien leur foi en Dieu, puisqu’étant des musulmans.
Cette tradition, qui remonte à la fin du quinzième siècle et qui fait partie désormais de l’agenda culturel de la capitale du Saloum, est une cérémonie rituelle qui est organisée sur le bras de mer de la localité, marquée par des prières.
Au cours de cette activité, communément appelée “Tourou Mbossé”, des offrandes dont du lait caillé sont faites au profit du génie tutélaire de Kaolack.
Selon Aliou Lô, un habitant de Kaolack, à l’instar d’autres localités du Sénégal, cette ville du centre du pays dispose également de son génie protecteur, Bar Mbossé Coumba Djiguène. “A travers un rituel, nous formulons des prières pour la paix au Sénégal”, a-t-il dit.
De l’avis de la prêtresse Adja Arame Sall, membre de la famille de “Mbossé”, ce rituel, qui est un “héritage ancestral”, a connu, au cours des dernières années, une ampleur jamais égalée.
“C’est un honneur pour moi de faire partie de ceux qui perpétuent la tradition. Nous sommes dans la continuité de nos ancêtres et nous devons préserver leur tradition telle qu’ils nous l’ont léguée. C’est une obligation pour nous, parce que notre seul vœu, c’est que Kaolack et le reste du Sénégal soient en paix”, a insisté Mme Sall.
Pour la directrice du centre culturel régional de Kaolack, Diouma Seck Ndao, le rite du “Mbossé” est un évènement inscrit à l’agenda culturel de la région, puisqu’il s’agit d’un “patrimoine immatériel” à sauvegarder et à promouvoir davantage.
“Ce patrimoine doit être sauvegardé et davantage promu. Il doit être approprié par les populations, parce que c’est toute une culture. Et le centre culturel régional s’attèle à faire la promotion de ce patrimoine immatériel”, a-t-elle indiqué.
Mme Ndao assure qu’actuellement, avec la modernisation et toute la transformation sociétale induite, si les parents n’éduquent pas leurs enfants pour la préservation de leur patrimoine, les acteurs culturels, à travers le centre culturel, peuvent bien jouer ce rôle afin de le valoriser.
“Pour valoriser son patrimoine, il faut nécessairement connaitre son histoire, sa culture. C’est dans ce sens qu’on veut éveiller certaines consciences pour ne pas nous acculturer, même si cela ne doit pas empêcher une ouverture à d’autres cultures”, a-t-elle fait valoir.
Selon Diouma Seck Ndao, malgré l’usure du temps, Mbossé Coumba Djiguène continue de jouer un rôle de cohésion sociale, particulièrement à Kaolack où personne ne peut toucher à un varan symbolisé par ce génie protecteur.

